Un enfant nous fait le récit tout en sensibilité de ses après-midi chez Bergamote. Bergamote, c’est une grand-mère, une tata ou une nounou : à chaque lecteur de décider. Une figure rassurante, aussi chaleureuse et accueillante que sa maison. Après une partie de cache-cache avec le chat Abricot, c’est l’heure du goûter : ça sent bon la menthe et la compote de pommes du jardin !
Le lecteur est spectateur silencieux et attentif de cette journée qui s’étire en douceur. Les sens sont mis en éveil par les illustrations de Junko Nakamura, où se mêlent couleurs automnales et magie des lumières. C’est une véritable ode aux petits moments délicieux du quotidien, à hauteur d’enfant.
— Texte Commission Prix Sorcières
Pony est le nouveau roman de RJ Palacio, l'autrice du fabuleux Wonder (éd. PKJ, 2014).
L'histoire se déroule en 1860, en Ohio juste avant la guerre de Sécession. Silas Bird, un garçon de douze ans, sensible et courageux, se lance dans un long voyage pour retrouver son père, Martin Bird, enlevé dans la nuit par un groupe de hors-la-loi.
Silas part sur un coup de tête avec Pony, un poney à la tête blanche apparu comme par magie. Il est accompagné de son meilleur ami/gardien Mittenwool et emporte pour seul objet, le violon ayant appartenu à sa défunte mère. Ainsi commence une odyssée périlleuse qui reliera Silas à son passé, son avenir et au monde qui l'entoure.
Pony est à la fois un western, un roman d'aventure mais aussi d'apprentissage. Encore une fois, R.J. Palacio explore les thèmes du courage, de l'amitié, de la perte et de la douleur et le résultat est tout simplement merveilleux.
— Un conseil de la librairie Libr'enfant à Tours
Conseillé par la Librairie Sorcière Le Rat Conteur à Bruxelles
Trois ans après le très remarqué diptyque Cité 19, Stéphane Michaka est de retour chez Pocket Jeunesse avec La mémoire des couleurs. Mauve a 15 ans, il arrive de nulle part et est amnésique. Un indice, son nom tatoué sur sa peau. Une particularité, il est télépathe. Une envie, retrouver la mémoire pour découvrir la raison de son arrivée en France. Alors qu'il reconstitue son parcours, qu'il apprivoise ses émotions et intègre de nombreuses découvertes, il se remémore une société avancée, sans guerre, unie, à la pointe de la technologie, un monde parfait. Mais qu'a bien pu faire Mauve pour subir l'exil ? La mémoire des couleurs oscille entre quête identitaire et anticipation, promène le lecteur au coeur d'une intrigue dense et bien construite en abordant à la fois des thèmes d'actualité et des questionnements universels. Stéphane Michaka nous séduit par son écriture efficace et élégante. Il nous charme aussi par la bienveillance et l'humanité qui transparaissent dans ses écrits. Il signe un roman fort que l'on aimera conseiller longtemps ! - Librairie Sorcière Le Rat Conteur à Bruxelles
Conseillé par la Librairie Sorcière Au Pain de 4 Livres à Yerres
Arlo Finch, douze ans, pose enfin ses valises. Sa vie de famille a basculé. Son père est recherché par les autorités: dettes colossales à rembourser, maison saisie, meubles vendus... Le père s’enfuit au Japon. Sa mère a pris les enfants, des valises et en route. Les petits appartements se succèdent, mais ça ne suffit pas. Alors reste la maison de famille, celle des grands-parents maternels, où l’oncle d’Arlo vit comme un reclus. Une maison biscornue décorée par des animaux empaillés. Son oncle est taxidermiste, bourru, mais lui n’a pas oublié que, enfant, des évènements étranges se déroulaient dans la petite bourgade de Pine Moutain dans le Colorado. À peine arrivé, Arlo découvre les fantômes d’un chien et d’une jeune fille qui l’entrainent sur la piste d’une forêt abyssale et mystérieuse. Un univers très étrange… John August, l’auteur, est aussi scénariste au côté de Tim Burton. Vous y reconnaîtrez un univers. C’est un récit sous tension, original.
— Conseillé par la Librairie Sorcière Au Pain de 4 Livres à Yerres
Conseillé par la Librairie Sorcière La Boîte à Histoires à Marseille
Il y a quelques années, les éditons du Rouergue créaient la collection Boomerang. Le principe: donner deux points de vue différents d’une seule et même histoire, deux récits tête-bêche à lire dans n’importe quel ordre et qui s’éclairent l’un l’autre. D’aucuns auraient pu craindre un procédé quelque peu artificiel, c’est ce que j’ai redouté au début je dois bien l’avouer, mais que voulez-vous ma bonne dame je suis de nature anxieuse. Or, c’est tout le contraire qui s’est produit, de vraies petites pépites d’écriture sont nées de cette collection qui se classe parmi les plus intéressantes et les plus innovantes de ces dernières années pour les jeune lecteurs. Et voilà-t-y pas que Cathy Ytak lance comme ça à son éditrice : et si on faisait la même chose pour les ados ?
C’est une fête d’ados qui est ici décrite, une des ces fêtes complètement débridées et très alcoolisées, la musique à fond, les cœurs et les corps déchaînés. Une soirée où tout se vit à cent à l’heure, un tourbillon de bruits, d’émotions et de sentiments.
C’est ce soir là qu’Emma a choisi pour dire à son copain qu’elle le quitte, qu’elle ne supporte plus ses bras autour d’elle comme une prison, sa façon de la traiter comme une chose, sa petite chose, son bébé d’amour, sa propriété.
Loïc, c’est le premier mec qui l’a vraiment regardée. Elle, petite nénette frêle au physique passe-partout, elle a suscité le désir de ce beau mec baraqué que toutes les filles convoitaient.
C’est le premier avec qui elle a fait l’amour et elle a adoré ça. Elle adore toujours d’ailleurs, son corps, ses mains… mais ça s’arrête là.
«Avant de le faire je pensais qu’à ça. Me trouver un mec. Un qui veuille bien de moi. Et pour moi c’était un tout: on s’aime, on fait l’amour. Que l’un puisse aller sans l’autre … Personne nous a dit que ça pouvait exister.»
Avec Loïc les délires ne sont pas les mêmes, les conversations tournent court. Pas comme avec Simon, son ami d’enfance, son pote, son frère, celui qui la connaît par cœur et a deviné depuis longtemps le malaise qu’elle ressentait.
Pour Simon aussi d’ailleurs, cette soirée sera une soirée charnière. Emma le sait, elle connaît l’attirance de son pote pour la belle Méline, cette grande fille énergique et plantureuse, à la peau noire, celle qui dépasse tout le monde d’une tête.
C’est comme ça que Simon imagine la fille de ses rêves, carrée, athlétique, les pieds bien plantés au sol et la poitrine généreuse. Et Méline ne semble pas indifférente à sa cour assidue, à ses regards brûlants qui en disent long. C’est même elle qui l’a invité à cette soirée. Si c’est pas un signe ça… une invitation tacite à coucher avec elle, ce soir, cette nuit et toutes les nuits d’après.
Mais la belle Méline ne semble pas se décider, alors Simon tente de noyer son désir dans l’alcool, de calmer son impatience dans une danse rageuse et enivrante qui le laisse à bout de souffle.
«Moi je ne sais plus attendre. Là j’ai envie, j’ai envie d’elle, c’est tout, et ça me rend dingue, et ça me rend amoureux et c’est pire encore.»
Fidèle au principe de la collection ce récit fonctionne en recto-verso et les deux récits de cette même soirée, du point de vue d’Emma et du point de vue de Simon, se lisent donc en miroir. On y découvre toutes les affres de l’adolescence, les tourments amoureux, la valse des sentiments et la brûlure du désir. A eux deux, Emma et Simon incarnent toutes les fragilités de cette période charnière, cet entre-deux délicat où tout a le goût d’absolu. Où les amours peuvent se conjuguer au pluriel et ne doivent répondre qu’à l’impérieux besoin de se sentir vivant.
Rien dans cette soirée ne se passera comme prévu et Cathy Ytak sait parfaitement décrire l’ivresse du désir, l’ivresse tout court et l’ambivalence des sentiments. On ressent dans son écriture émouvante et percutante à la fois cette sensation d’urgence que peuvent éprouver les adolescents, urgence à vivre tout intensément. (Entre parenthèses, j’ai bien apprécié je dois dire, que la première expérience sexuelle et l’appréhension qui en découle soient vues du côté du garçon, et non pas du côté de la pauvre jeune vierge effarouchée, comme j’ai trop souvent l’impression de le lire. Pour une fois c’est le mec qu’on voit en proie aux doutes et en position de fragilité. C’est bien, ça nous change).
Cathy Ytak a un talent tout particulier pour évoquer et décrire l’adolescence, pour parler de façon crue, franche et poétique à la fois de sexualité et de tout ce qu’il y a de troublant et d’ambivalent dans le désir amoureux. En deux fois trente pages terriblement bien écrites, ce roman très intense se lit dans un souffle et mériterait d’être lu par tous les ados.
Véronique Benay, Librairie Sorcière La Boîte à Histoires à Marseille